Une scolarité clandestine en Afghanistan

Contexte :

Depuis le retour des Talibans au pouvoir en Afghanistan, le 15 août 2021, l’éducation des filles au-delà de l’école primaire a été interdite. Même si le niveau de la scolarité depuis 20 ans était loin d’être suffisant, dans les villes, la présence des écoles a permis une génération de filles de terminer leurs études scolaires et universitaires et entreprendre une carrière professionnelle. Tout cela a été stoppé net du jour au lendemain , au grand désespoir des principales concernées.. S’il n’est pas possible de rattraper la scolarité condamnée de toutes les élèves, quelques rares écoles privées subsistent pour les familles qui peuvent les payer.

En dépit de la rigueur des mesures des Talibans, tout indique que les familles désirent que leurs filles poursuivent leur éducation et les filles elles-même y tiennent particulièrement. Un état de depression chez elles et les tentatives quotidiennes de suicide démontrent montrent l'étendue de leur desespoir.

Nous avons créé deux series de projets: 1. E-leaning pour lycéennes et universitaires et 2. Des cours clandestins pour des collégiennes et lycéennes.

Néanmoins pour les élèves dépourvues de moyens (l’immense majorité) une solution gratuite devait être trouvée. Le e-learning n’est pas une solution pour les scolaires : outre le prix élevé des abonnements et de l’électricité, les plus jeunes n’ont pas de téléphone portable, réservé à leurs frères aînés. La méthode d’enseignement clandestin que nous avons choisie est inspirée de celle qu’utilisaient les femmes lors du premier règne taliban dans les années 90. Bien entendu, ce travail n’est pas dépourvu de risques.

Notre équipe

Avec un comité fondateur composé d’Afghans en exil, en particulier Ibrahim Mateen (ingénieur) Rateb Noori (journaliste), Sahra Noori (chimiste) Lutfia Atay (traductrice) nous avons mis en place un projet qui comprend à la fois des cours clandestins en Afghanistan et la ‘Afghan University in Exile’. Chacun des membres fondateurs reste très actif dans le projet.

Résultats escomptés et indicateurs : La scolarité des filles ayant étant interdite depuis la reprise de la domination des Talibans, il est urgent de sauver l’avenir de la jeune génération ainsi que celles de leurs enseignantes condamnées à la misère sans ce travail. La demande est énorme mais le projet ne peut se réaliser qu’en recrutant des enseignantes une à une dans la plus grande discrétion.

A partir de février 203, nous sommes associées à l'association Nayestane et nous réunirons nos forces et nos enseignantes pour plus d'éfficacité!

I. Les cours clandestins pour jeunes filles en Afghanistan Responsable pédagogique et organisatrice : Lutfia Attay

Bénéficiaires Les cours clandestins servent à venir en aide aux collégiennes et lycéennes privées de scolarité depuis l’arrivée des Talibans et permettent aux familles des enseignantes de survivre. Nous avons commencé en octobre 2021 avec 5 enseignantes pour arriver à 22 un an plus tard, grâce aux aides reçues en route.

Courant 2023, nous désirons recruter encore 18 enseignantes pour arriver à 40

Les cours ont lieu dans de nombreuses régions d’Afghanistan, y compris des plus reculées (Badakhshan, Parwan, Helmand ) et certaines grandes villes Kaboul, Kunduz, Baghlan, Tcharikar. La majorité des cours ont lieu dans des contrées non pachtounes où la présence des Talibans se fait moins sentir. Mais les risques bien entendu demeurent.

Nos 375 élèves : Des jeunes filles, élèves du niveau collège-lycée, environ 11 à 17 ans, les plus menacées de toutes. En octobre 2022, elles sont entre 15 et 20 par classe- soit 375 pour la période qui a démarré en octobre 202I. Elles habitent le quartier de leurs enseignantes et peuvent se rendre assez facilement à leurs cours.

D'ici fin 2023, nous pensons avoir 550 élèves

Nos 22 enseignantes : Avec l’aide de réfugiés afghans en France, et en fonction de notre budget, nous avons pu trouver des enseignantes qui donnent des cours de façon clandestine à environ 15 à 20 élèves chacune. De 6 enseignantes en octobre 2021, nous sommes passées à 22 un an plus tard. Elles ont en majorité exercé ce métier dans des établissements scolaires précédemment et suivent le programme scolaire qui avait été établi par le gouvernement précédent. Nous avons donné la priorité aux soutiens de famille et aux veuves (deux d’entre elles ont cinq enfants à charge chacune). Toutes ont perdu leur travail et tout autre moyen de survie. Elles reçoivent les élèves chez elles, dans leur cour ou dans une pièce séparée du lieu de vie. À cela, notre directrice pédagogique Lutfia Attay anime des discussions régulières et des mini-cours de théâtre sur des thèmes importants sur les droits des femmes entre autres. Paiement des enseignantes Les enseignantes ont été payées directement 5 000 Afghanis par mois ce qui au début du projet équivalait 50 € mais aujourd’hui, à cause de l’inflation, la somme allouée revient à peu près à 65 €. Nous ajoutons une prime de 2 500 Afg au début de leur enseignement pour les fournitures scolaires et cet hiver, chacune reçoit 10 000 Afg pour payer le chauffage, d’autant que les hivers sont rigoureux. L’argent est envoyé par des systèmes du type Western Union ou équivalent, selon les possibilités, il n';y a pas d’intermédiaire. Les frais d’envoi et de change (toujours défavorable pour nous) tournent autour de 10 %. Cette partie du projet est gérée par Lutfia Attay à qui les enseignantes envoient des rapports, dessins et photos régulièrement par le biais d’un groupe WhatsApp auquel tous ceux et celles qui nous soutiennent et qui le désirent peuvent se joindre.

AVENIR DU PROJET :

Cependant avec l’inflation, ces sommes sont insuffisantes et nous désirons doubler au minimum le budget alloué à chaque enseignante et aussi doubler le nombre d’enseignantes

C'est pourquoi nous nous sommes associées à l'association Nayestane et nous réunissons désormais nos forces et nos enseignantes à partir de 2023. TÉMOIGNAGES RAPPORT APRÈS UNE CONVERSATION COLLECTIVE AVEC LES ENSEIGNANTES LE 23 octobre 2022

À cause des problèmes d’électricité (coupures fréquentes) et des coûts élevés d’internet en Afghanistan, nous n’avons pu parler qu’à une dizaine d’entre elles. Pour des raisons de sécurité, nous ne précisons ni les noms ni le lieu où elles enseignement La traduction a pu être assurée par la gestionnaire de cette partie du projet, Lutfia Attay. Toutes nous ont dit qu’elles sont le soutien principal de leur famille. Elles nous ont assuré que la demande était énorme, que des élèves et leurs familles étaient très enthousiastes ce qui leur assure une certaine protection La majorité des cours ont lieu dans des contrées non pachtounes où la présence des Talibans se fait moins sentir. Mais les risques bien entendu demeurent. C’est pourquoi chacune nous raconte qu’elles ont toujours un exemplaire du Coran à portée de main et à chaque élève apporte un quelconque ouvrage de couture avec lequel elles recouvrent leurs livres et cahiers en cas d’irruption intempestive des Talibans, ce qui arrive parfois. Au moins deux d’entre elles ont mis une affiche sur leur porte précisant qu’« ici unedame donne des cours de couture pour les jeunes filles ». Une professeure (veuve et mère de trois enfants) raconte :  Une nuit, vers 3 heures du matin j’étais en train de repasser, c’était le seul moment où il y avait de l’électricité, alors j’en ai profité. J’entends des cris dans la rue. Je vais voir à ma fenêtre et je constate que des Talibans ont de toute évidence tué un homme. Un d’entre eux me remarque et les voilà qui veulent défoncer ma porte. Je refuse leur ouvrir en criant ‘Ici, il n’y a pas d’hommes, uniquement des femmes, si vous voulez rentrer, il faut revenir avec votre chef’. Je me précipite pour tout cacher, mais ils ne sont pas revenus .

Problèmes/dangers rencontrés:

Nous leur avons demandé quels étaient les principaux problèmes qu’elles rencontraient S'il y a une intrusion de la part d’une milice talibane, les enseignantes ont toujours un exemplaire du Coran auprès d’elle et disent dispenser un cours d’instruction religieuse. Sinon chaque élève a un travail de couture à portée de main. Deux de nos enseignantes donnent en plus des cours de couture. Le niveau des élèves pose parfois problème : deux enseignantes nous ont dit qu’en dépit de leur niveau hypothétique de collège, certaines ont encore des problèmes de lecture, ce qui reflète le niveau de la scolarité précédente. C’est pourquoi une remise à niveau est essentielle avant de démarrer le programme scolaire officiel. Si, il y a un an, les quelques enseignantes que nous venions de recruter n’ont pas voulu de parler d’un problème réel, sans doute trop gênées à ce moment-là, cette fois-ci elles l’ont évoqué. Il s’agit du froid extrême en hiver, tellement sévère que les écoles sont fermées de janvier à mars. Avec l’augmentation des prix en particulier des combustibles, elles ont tout juste les moyens de chauffer une pièce - et encore. Dans cette société ultra-patriarcale et conservatrice, les jeunes filles ne sauraient se trouver dans la même pièce que des hommes auxquels elles ne sont pas apparentées, les enseignantes ont besoin d’assistance si les cours doivent continuer durant l’hiver. C’est pourquoi nous avons décidé de subventionner le bois de chauffage durant l’hiver

L’état (toujours précaire) de nos finances Pour 2021-2022, nous avons pu bénéficier d’une aide de la DIAIR et pour 2022-2023 une bourse de la Fondation Raja Danièle Marcovici ainsi qu’un don d'une branche de Mères pour la Paix mais en vue de l’ampleur croissante que prend ce projet, ces subventions sont insuffisantes pour payer 33 enseignantes et satisfaire les très nombreuses demandes c’est pourquoi nous nous dépendons de vos dons Des ventes, des repas caritatifs ont lieu pour soutenir notre action

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